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Thérapeutique Dermatologique
Un manuel de référence en dermatologie

Pelade

31 mai 2019, par ASSOULY Ph.

1 - DE QUOI S’AGIT-IL ?

La pelade est une pathologie dermatologique qui peut toucher les cheveux, les poils, les ongles. Elle est relativement fréquente, puisqu’elle affecte 2,1% des personnes au cours de leur vie. Ce n’est pas une pathologie grave : elle ne « cache rien » : il n’existe aucune pathologie sous-jacente qui pourrait en être responsable et qui serait à rechercher.

2 - COMMENT SE PRESENTE-T-ELLE ? 

La pelade peut apparaitre sous forme de plaque(s) sans cheveu, le plus souvent ronde(s) ou ovalaire(s) (pelade en plaques appelée anciennement alopécie en aires et en anglais alopecia areata) ; il s’agit de la forme la plus commune. Parfois elle début au niveau de l’occiput et s’étend progressivement vers les parties latérales en remontant au dessus des oreilles (pelade ophiasique). Elle peut plus rarement affecter tout le crâne (pelade décalvante totale). Si les poils corporels sont aussi affectés on parle de pelade universelle. Les ongles peuvent notamment présenter des petits creux donnant un aspect de dé à coudre (dépressions ponctuées) ou être plus largement abimés, rugueux comme si l’on les avait râpés dans le sens de la longueur (trachyonychie). Toutes les structures pileuses peuvent être individuellement atteintes : les sourcils, les cils la barbe chez l’homme, certaines zones de poils corporels, en plaques ou de manière diffuse.

En bordure de plaque on peut voir des cheveux en point d’exclamation qui sont des petits cheveux cassés de quelques millimètres et peu adhérents.

3 - COMMENT ÉVOLUE LA PELADE ?

De manière très capricieuse…

En effet l’évolution se fait par épisodes ; une personne peut présenter un seul épisode au cours de sa vie, ou en avoir de multiples, être « tranquille » plusieurs années puis présenter un nouvel épisode sans raison. Les épisodes peuvent être d’intensité, d’étendue et de durée variable. Peu de signes permettent de juger de l’évolution d’une pelade qui est de fait une maladie surprenante et déstabilisante. Il semble par contre admis qu’une pelade étendue qui apparait tôt durant l’enfance a plus de risque de s’aggraver ou récidiver de manière sévère en surface. Ce fait n’est toutefois que statistique mais n’a pas de valeur individuelle. Il existe de multiples intermédiaires et formes cliniques et évolutives entre une pelade se présentant en une seule plaque qui repousse spontanément en deux mois et beaucoup plus exceptionnellement une pelade universelle qui ne se modifie pas pendant de nombreuses années.

4 - UN BILAN EST-IL NÉCESSAIRE ?

En général non. Le bilan : c’est l’examen clinique du médecin. Mais votre médecin peut parfois considérer qu’une prise de sang serait utile en fonction de signes cliniques, pour vérifier s’il n’existe pas une autre maladie auto-immune associée : en effet puisque la pelade est une maladie auto-immune, elle prédispose un peu plus à d’autres maladies auto-immunes qui sont aussi fréquentes dans la population, comme celles affectant la thyroïde. S’il s’avérait que la thyroïde fonctionnait mal, la situation serait vite rétablie par un traitement simple (malheureusement sans influence sur la pelade elle-même…).

Par ailleurs les personnes qui ont une pelade ont une plus grande susceptibilité à avoir une tendance « allergique », c’est-à-dire une prédisposition à l’eczéma, l’asthme, la rhinite allergique - qui sont par ailleurs fréquents dans la population générale. Ces pathologies n’ont de manière générale pas de conséquence spécifique sur la pelade.

Contrairement à ce qui était parfois réalisé il y a de nombreuses années les radiographies des dents, les interventions sur les dents n’ont aucun intérêt pour ce qui concerne la pelade.

5 - LE STRESS EST-IL EN CAUSE ?

Pas spécialement : les facteurs psychologiques et plus spécifiquement un « stress » sont souvent incriminés par les patients et leur entourage, voire par certain médecins comme une cause de la pelade (et de manière un peu trop générale pour les problèmes cutanés). Nous savons tous qu’existent des interconnections entre le psychisme et le système immunitaire (puisque nous l’avons vu la pelade est une maladie auto-immune) et qu’un stress est parfois noté de manière nette dans les jours ou semaines qui précèdent le déclenchement d’un premier épisode de pelade. Toutefois ce phénomène reste sans valeur statistique et les études rigoureuses réalisées ne montrent généralement pas de corrélation significative entre un événement stressant et un premier épisode. Les troubles psychologiques que l’ont peut retrouver en association avec une pelade sont variés et peuvent parfois… être la conséquence de la pelade elle même.

6 - DOIT-ON VOIR UN « PSY » ?

Il n’y a pas de règle. Le but ici ne serait pas de chercher une cause psychologique à une pelade, nous l’avons vu, mais de se sentir au mieux malgré cette pathologie qui peut être déstabilisante. Les conséquences de la pelade sur l’humeur, la vie sociale et professionnelle ou scolaire, affective, sur ce que l’on nomme la « Qualité de Vie » sont certaines et variables selon le type de pelade et la personne affectée : son âge, son sexe, ses origines et son histoire personnelle. Un avis spécialisé de psychothérapeute peut être parfois utile mais non systématique, il peut être discuté avec le médecin qui prend en charge la pelade.

7 - EST-CE QUE JE VAIS TRANSMETTRE LA PELADE À MES ENFANTS ?

Le risque de développer une pelade au sein d’une famille où existent des antécédents de pelade est très variable, selon le patrimoine génétique transmis. La situation est bien entendu différente lorsque plusieurs personnes proches au sein d’une même famille présentent une pelade (par exemple un parent, et un grand parent, et des oncles ou tantes, …) ou s’il s’agit d’un phénomène isolé. On considère qu’en moyenne si l’un des deux parents est atteint d’une pelade sévère (décalvante, universelle), le risque pour l’enfant de développer une pelade au cours de sa vie serait de 6 % et celui de développer une pelade sévère de 2 %. Par contre pour ce qui concerne des jumeaux monozygotes (« vrais jumeaux »), si l’un des deux présente une pelade, le risque pour le second jumeau serait de 55%.

8 - LA PELADE EST-ELLE UNE MALADIE AUTO-IMMUNE ?

Oui : certains globules blancs, notamment des lymphocytes particuliers ne reconnaissent plus le bas de la racine pilaire, c’est-à-dire le bulbe, comme étant un élément « normal » de l’organisme. Ils s’y attaquent et entourent ce bulbe comme des abeilles autour d’un essaim. Le cheveu ou le poil ainsi attaqué s’arrête de fonctionner, il se casse (c’est le cheveu dit « en point d’exclamation ») puis tombe et laisse une peau lisse, sans tige pilaire apparente. Il n’y a là qu’un blocage, sans destruction du follicule et lorsque les lymphocytes partent, spontanément ou sous l’effet d’un traitement, le cheveu ou le poil fonctionne à nouveau normalement. Le problème, c’est que ces lymphocytes sont parfois têtus et nombreux, et qu’ils obéissent à des règles qui ne sont pas encore très claires pour les médecins et chercheurs.

9 - ÇA PEUT REPOUSSER TOUT SEUL ?

Oui, et même assez souvent pour les pelades en plaques (60% des pelades qui couvrent moins de 40% du cuir chevelu) ; aussi mais moins facilement pour les pelades décalvantes et universelles. Bien entendu plus une pelade est ancienne et rebelle, plus les chances de repousser spontanément diminuent, et plus les risques d’une récidive augmentent. Là encore ces données sont statistiques, mais n’ont pas une valeur systématique individuelle. Ne pas traiter une pelade n’aggrave pas les risques de ne pas la voir repousser dans le futur. Nous ne sommes donc pas tenus de faire repousser rapidement et « à tout prix ».

10 - QUELS SONT LES TRAITEMENTS EXISTANTS ?

La plupart des traitements utilisés actuellement sont destinés à faire disparaitre les globules blancs qui attaquent les follicules pileux. Pour le moment les traitements dont nous disposons n’ont qu’un effet suspensif puisque d’autres globules blancs peuvent apparaitre au cours de cet épisode ou au cours d’autres épisodes. Nous ne développerons pas chacun des traitements et n’exposerons pas leurs avantages spécifiques, contre indications, effets secondaires ou risques potentiels qui seront à envisager avec votre médecin. Lui seul peut juger avec vous du meilleur traitement à entreprendre. Les traitements généralement employés sont :

La cortisone, qui est un traitement de base des maladies inflammatoires et auto-immunes :

— En application locale (corticothérapie locale), c’est un traitement simple et sans danger en employant les doses préconisées par votre médecin. Son intérêt est démontré et permet d’agir sur bon nombre de formes de pelade, chez l’adulte ou chez l’enfant.

— En injections locales (injections faites par le médecin dans la peau) chez l’adulte et l’enfant de plus de 13 ans, sur des zones et quantité limitées. Elles permettent une repousse « en touffes » en quelques semaines sur les zones injectées.

— Par voie générale, , dans des cas particuliers de durée limitée, dont l’indication est posée par le médecin spécialiste.

Des préparations à base de dérivés de goudrons (l’anthraline ou dioxyanthranol) appliqués en contact bref sur les zones atteintes du cuir chevelu. Ce traitement est irritant.

Le minoxidil peut épaissir une repousse, il n’a pas d’effet sur le mécanisme qui régit la pelade. 

La photothérapie (PUVAthérapie le plus souvent, c’est-à-dire association d’un médicament appelé psoralène et de rayons Ultra Violets A) est utilisée sur une période limitée et quantifiée par le dermatologue, dans une cabine destinée à ce traitement. L’indication de ce traitement est posée par le médecin spécialiste, car il n’est pas adapté à tous. Les UVB, le laser ou lampe Excimer 308 nm sont des déclinaisons de la photothérapie, dont l’effet parait inférieur à la PUVAthérapie.

L’immunothérapie de contact est un traitement réalisé dans certains centres spécialisés qui consiste à rendre les patients allergiques à une substance chimique (la diphencyprone généralement) qui est ensuite appliquée sur les zones de pelade. L’eczéma ainsi créé peut favoriser la repousse. Il est préconisé dans des cas particuliers.

Un immunosuppresseur : le méthotrexate, pris en comprimé ou injecté en intramusculaire est lui aussi parfois proposé par le dermatologue pour des pelades sévères et rebelles.

Existent d’autres traitements dont l’effet est discuté ou n’a pas été validé dans les études réalisées. 

D’autres traitements sont à l’étude, comme les anti-JAK, des molécules dont le mécanisme d’action tend à agir d’une manière précise sur la réaction immunologique de la pelade. Comme avec les autres traitements l’effet éventuel n’est que suspensif (une rechute survient à l’arrêt si la pelade est toujours active) et les effets secondaires restent à mesurer du court au long terme.

11 - ET LES MOYENS DE CAMOUFLAGE ? 

Une prothèse capillaire, ou perruque, ou postiche peut rendre service pour une personne présentant une pelade étendue. Une ordonnance rédigée par le médecin permet en France son remboursement partiel (250 à 350 €, lorsque son prix n’excède pas 700 €) par la sécurité sociale, plus ou moins complété selon les mutuelles. Les prix varient selon la qualité, le type de cheveux (synthétiques ou naturels), le support et le mode d’implantation des cheveux sur le support. 

La dermopigmentation (tatouage) des sourcils ou du bord libre des paupières, en particulier chez la femme, peut être réalisé par des personnes compétentes. On apportera si possible des clichés antérieurs à la pelade pour apprécier la forme des sourcils. La dermopigmentation ne gêne pas la repousse.

12 - ET LA RECHERCHE, ÇA AVANCE ?

De nombreuses équipes travaillent et sur ce sujet à travers le monde : sur la physiopathologie (mécanismes d’apparition) et sur les moyens thérapeutiques. Chaque année de nombreux articles sont publiés sur la pelade dans des revues scientifiques spécialisées. Ils n’ont bien entendu pas toujours de répercussion rapide sur le traitement de la pelade qui vous préoccupe, mais permettent d’avancer par petits ou grands pas dans la compréhension et la prise en charge de cette pathologie.

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