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Thérapeutique Dermatologique
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Lymphadénopathie angio-immunoblastique

23 février 2009, par JOLY P.

1 - GÉNÉRALITÉS

La lymphadénopathie angio-immunoblastique (LAI) a longtemps fait l’objet de controverses quant à sa physiopathologie, à son pronostic, aux traitements à mettre en œuvre et même jusqu’à sa dénomination. Décrite depuis 20 ans comme un syndrome regroupant de nombreuses manifestations cliniques, biologiques et histologiques, à la fois évocatrices d’une maladie lymphoproliférative et d’un désordre immunitaire. Cette maladie dysimmunitaire associe des signes d’hyperactivité du système immunitaire (hypergammaglobulinémie, signes d’auto immunité) et un déficit immunitaire à l’origine d’infections fréquentes et parfois fatales [12]. Les progrès réalisés ces dernières années ont permis de classer la lymphadénopathie angio-immunoblastique parmi les lymphomes T non hodgkiniens dans la WHO classification [7].

La maladie, de diagnostic difficile, survient le plus souvent entre 50 et 70 ans (sexe/ratio : 1) avec un début volontiers brutal comportant des signes généraux (fièvre, amaigrissement, sueurs nocturnes, prurit) et une polyadénopathie associée à une hépatomégalie. Une éruption cutanée est présente dans 45 p. 100 des cas. D’autres manifestations sont décrites à type d’arthralgies, d’infiltrats pulmonaires, d’adénopathies médiastinales, d’épanchement pleural ou péritonéal. L’atteinte cutanée est non spécifique et très polymorphe. Elle consiste le plus souvent en une éruption maculo-papuleuse faisant errer le diagnostic vers une pathologie virale ou toxi-médicamenteuse, d’autant qu’un facteur déclenchant médicamenteux est fréquemment retrouvé. D’autres manifestations cutanées sont décrites à type de plaques, de nodules, d’ulcérations ou de purpura infiltré.

Une anémie normochrome, normocytaire est très souvent présente (75 p. 100 des cas), le plus souvent en relation avec une anémie hémolytique auto-immune (test de Coombs positif). De nombreuses autres anomalies de l’hémogramme sont également décrites : hyperleucytose et leucopénie, thrombocytose et thrombopénie, éosinophilie, lymphopénie, cellules atypiques circulantes. Une hypergammaglobulinémie polyclonale est habituelle (70 p. 100 des cas), de même qu’une élévation du taux des LDH. Quelques cas de gammapathie monoclonale et d’hypogammaglobulinémie sont décrits. Enfin, des manifestations d’auto-immunité doivent également être recherchées : test de Coombs, cryoglobulinémie, facteur rhumatoïde, facteurs antinucléaires, anticorps anti-muscle lisse, antithyroïdiens, antiplaquette, antimitochondrie, complexes immuns circulants et protéinurie de Bence-Jones.

Le diagnostic repose en grande partie sur la mise en évidence d’anomalies histologiques fortement évocatrices au niveau du ganglion : destruction de l’architecture folliculaire due à la présence d’un infiltrat cellulaire polymorphe comportant des immunoblastes plus ou moins nombreux (d’où le nom de la maladie), mais aussi des lymphocytes à noyau irrégulier et à cytoplasme clair, des plasmocytes, des polynucléaires éosinophiles et des cellules épithélioïdes, associés à un important réseau vasculaire constitué de petites veinules.

Les immunomarquages révèlent une prédominance de lymphocytes T de phénotype CD4+ mature. Les cellules tumorales expriment le CD10 et souvent BCL6 suggérant leur origine à partir des centres germinatifs. CXL13 chemokine produite par les cellules T des centres folliculaires est constamment exprimée au cours de la LAI. CXL13 entraîne le recrutement, l’activation et la prolifération de lymphocytes B vers les centres folliculaires des ganglions. La production de CxL13 par les cellules tumorales est vraisemblablement responsable de la présence fréquente de cellules B clonales dans les lésions, de l’hypergammaglobulinémie et de diverses manifestations auto immunes. L’origine centrofolliculaire des cellules tumorales est également suggérée par le profil d’expression génique de ces cellules [4].

Des lymphocytes B-EBV+ sont détectées très précocement dans l’évolution de la maladie, ce qui a suggéré l’hypothèse que la prolifération clonale des lymphocytes T pourrait initialement correspondre à un processus spécifique d’antigène. L’EBV pourrait ainsi initier la malade en activant les cellules centrofolliculaires, entraînant la production de CXCL13 ; CXCL13 activant en retour les cellules B et créant une boucle d’amplification [3].

Enfin, des études récentes utilisant la microdissection ont montré que les cellules lymphomateuses et les cellules endothéliales exprimaient fortement le facteur de croissance vasculaire, le VEGF-A. Une forte expression de VEGF-A semble d’ailleurs correspondre à un pronostic péjoratif. Cette hyper expression d’un facteur de croissance vasculaire ouvre des perspectives thérapeutiques intéressantes [15].

L’histologie cutanée peut également être contributive mais elle est souvent peu spécifique ; un infiltrat lymphocytaire périvasculaire modéré est plus fréquemment retrouvé qu’un infiltrat lymphomateux caractéristique. L’étude du réarrangement des gènes codant les récepteurs pour l’antigène des lymphocytes indique, dans la majorité des cas, la présence d’un composant clonal T dans les ganglions atteints. Un réarrangement identique est souvent retrouvé dans l’infiltrat cutané, même lorsque l’image histologique n’est pas spécifique [9]. Des anomalies cytogénétiques (trisomie 3, 5, chromosome X additionnel) sont également décrites.

La maladie est actuellement considérée comme un lymphome T de pronostic intermédiaire (classification WHO).

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