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Thérapeutique Dermatologique
Un manuel de référence en dermatologie

Incontinentia pigmenti

2 février 2019, par MORICE-PICARD F. & LÉAUTÉ-LABRÈZE Ch.

1 - DÉFINITION DE LA MALADIE, CLINIQUE ET ÉVOLUTION

L’incontinentia pigmenti est une génodermatose rare liée à l’X. Il s’agit d’une affection multisystémique classée caractérisée par une atteinte de la peau, des dents, des yeux et du système nerveux central. Elle est classée dans le groupe des dysplasies ectodermiques en rapport avec une anomalie de la voie NF-kappaB. Elle survient principalement chez les filles et est généralement létale chez les garçons [1]. Le phénotype typique est le résultat d’un mosaïcisme fonctionnel, phénomène survenant dans les affections dominantes liées à l’X du fait du mécanisme d’inactivation aléatoire d’un des chromosomes X (Lyonnisation). Les zones atteintes correspondent aux cellules exprimant l’X porteur de l’anomalie génétique. Les patients présentent à la naissance une éruption érythémateuse et vésiculeuse de disposition linéaire qui évolue au cours du temps et devient verruqueuse, pigmentée puis atrophique [2].

Le gène en cause est le gène IKK-γ ou NEMO. Il code pour une protéine appelée NEMO qui correspond à une sous-unité régulatrice d’un complexe enzymatique I-Χβ-kinase (IKK) [3]. Ce complexe joue un rôle dans l’activation d’un facteur de transcription NF-kB, qui contrôle l’activité de nombreux gènes cibles codant pour des chemokines, des cytokines, des molécules d’adhésion et des molécules protectrices contre l’apoptose. Les cellules IP sont hautement sensibles à l’apoptose induite par le TNF, ce qui suggère un rôle de cette cytokine dans le développement des lésions cutanées et des anomalies ophtalmologiques et neurologiques associées à l’IP. Une mutation préférentielle, correspondant à un large remaniement génomique emportant les exons 4 à 10 du gène IKK-γ et entraînant une perte de fonction de NEMO est retrouvée dans près de 85% des cas d’IP, principalement dans les formes de novo de la maladie.

1.1 - ATTEINTE CUTANÉE

L’incontinentia pigmenti évolue classiquement en quatre stades successifs. La durée de chaque stade est variable d’un individu à l’autre et les différents types de lésions peuvent coexister. L’éruption cutanée survient classiquement le long des lignes de Blaschko correspondant à des lignes de migration des cellules cutanées embryonnaires.

Stade I- Le stade bulleux est caractérisé par des lésions vésiculeuses à base érythémateuse et oedémateuse de disposition linéaire. Le plus souvent l’éruption est absente à la naissance et apparait dès les premières heures ou premiers jours de vie. Habituellement, cette phase régresse avant l’âge de 18 mois, rarement des résurgences tardives ont été décrites, notamment lors d’épisodes infectieux [4].

Stade II- Le stade verruqueux est caractérisé par le développement de lésions verruqueuses hypertrophiques toujours suivant les lignes de Blaschko à la suite des lésions vésiculeuses. Ce stade régresse généralement en quelques mois. Rarement, le stade II a été observé dès la naissance après régression très rapide de l’éruption vésiculeuse. Le stade II peut comporter une dystrophie unguéale et des anomalies de l’éruption dentaire.

Stade III- Le stade pigmenté qui a donné son nom à la maladie, est caractérisé par une hyperpigmentation brune ou gris-clair prenant un aspect en tourbillon sur le tronc et linéaire sur les membres. L’hyperpigmentation n’est pas présente à la naissance, elle commence entre l’âge de 6 mois et un an, quand le stade II commence de régresser. L’hyperpigmentation s’estompe dans la deuxième décennie.

Stade IV- Le stade atrophique est caractérisé par un aspect d’hypopigmentation et une alopécie de disposition linéaire particulièrement remarquable au niveau des extrémités et du scalp.

L’atteinte cutanée est associée à une atteinte des phanères. Des zones alopéciques peuvent siéger sur le scalp, les extrémités ou le tronc. Les alopécies du scalp peuvent correspondre à une zone cicatricielle survenue après une éruption bulleuse de stade I ou bien être présentes d’emblée. Ces zones alopéciques peuvent être de petite taille et peu visible. Les cheveux sont souvent fins et épars ainsi que les cils et les sourcils épars.

1.2 - ATTEINTE EXTRACUTANÉE 

Les manifestations extracutanées conditionnent le pronostic.

Atteinte ophtalmologique

Elle est d’origine inflammatoire et ischémique, touche initialement la rétine et se caractérise par un défaut de développement des vaisseaux rétiniens et des cellules de l’epithélium pigmentaire rétinien.  L’ischémie rétinienne secondaire entraine une néovascularisation suivi d‘une exsudation et de fibrose. Les patients avec une IP ont un risque accru de décollement de rétine qui survient dans l’enfance généralement avant l’âge de 6 ans [5, 6]. Les autres anomalies observées incluent des myopies sévères, un strabisme, une atrophie optique, une cataracte et une uvéite. Les anomalies ophtalmologiques sont observées chez environ 20% des patients IP. Il semble que la présence d’anomalies ophtalmologiques soit un marqueur d’une atteinte neurologique associée.

Atteinte neurologique

Elle est également d’origine inflammatoire et ischémique, avec constitution d’infarctus cérébraux [7]. Les anomalies neurologiques dans l’IP sont souvent précoces. Elles incluent des convulsions en période néonatale, un déficit intellectuel et d’autres anomalies comme un déficit moteur ou une parésie spastique. L’IRM cérébrale peut montrer des anomalies telles que des plages de nécrose, un retard de myélinisation, des anomalies du corps calleux. Elles sont présentes chez 15 à 30% des patients selon les séries. Les patients de sexe masculin avec une IP sont plus susceptibles de présenter des complications neurologiques.

Atteinte odontologique

Les signes dentaires dans l’IP sont présents chez près de 80% des patients et constituent un élément diagnostic important car ils persistent toute la vie [2]. Les signes typiques incluent un retard d’éruption, une oligodontie, une malformation des couronnes avec des dents coniques et des talons cuspides. Le retard d’éruption dentaire est constant. Il n’y a généralement pas de dysplasie de l’émail.

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