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Thérapeutique Dermatologique
Un manuel de référence en dermatologie

Dermatite atopique

13 février 2018, par BARBAROT S. & VESTERGAARD C. & WOLLENBERG A.

1 - REMERCIEMENTS

Le texte ci-dessous nous a été fourni par l’ETFAD (European Task Force Atopic Dermatitis, groupe de travail européen sur la dermatite atopique) et l’EADV (European Academy of Dermatology and Venereology).

Ce texte a été écrit par Sebastien Barbarot, Christian Vestergaard, Andreas Wollenberg, pour l’ETFAD.

La mise à jour est de février 2018.

Le pdf est téléchargeable ici

2 - QU’EST-CE QUE LA DERMATITE ATOPIQUE ?

Le terme eczéma est un terme générique qui désigne une inflammation de la peau (peau rouge et gonflée, qui desquame et qui démange). La forme la plus fréquente d’eczéma est la dermatite atopique (DA), aussi nommée eczéma atopique ou neurodermatite. La meilleure façon de savoir si votre enfant souffre de DA (et non d’une autre forme d’eczéma), c’est de consulter votre médecin. Les dermatologues, les pédiatres, les allergologues ainsi que certains médecins généralistes sont spécialisés dans le traitement de la DA. Il n’est habituellement pas nécessaire de pratiquer un test sanguin ni des tests de dépistage d’allergie pour savoir si une DA est présente.

3 - QUELLE EST LA FREQUENCE DE LA DERMATITE ATOPIQUE ?

La DA est une maladie fréquente. 10 à 15 % des enfants et environ 3 à 5 % des adultes souffrent de DA en Europe, mais cette fréquence varie. La DA semble plus fréquente dans les grandes villes et dans les pays industriels que dans les régions rurales. La cause de ce phénomène reste obscure, mais des facteurs environnementaux et liés au mode de vie sont très probablement en cause.

4 - COMMENT RECONNAITRE LA DERMATITE ATOPIQUE ?

Les adultes et les enfants souffrant de DA présentent habituellement des plaques rouges symétriques sur la peau, correspondant à une inflammation ; ces plaques sont sèches et démangent. Ces plaques peuvent être situées sur les joues (en particulier chez le petit enfant), les bras, les jambes, les poignets et souvent au niveau des plis. L’emplacement des plaques de DA dépend de chaque sujet et les plaques peuvent se trouver n’importe où à la surface du corps. Parfois, lorsque la DA est présente depuis longtemps, la peau épaissit. Parfois la peau affectée suinte ou saigne pendant les poussées, en particulier si le patient s’est beaucoup gratté. La DA cause presque systématiquement des démangeaisons, et parfois des douleurs ou une sensation de brûlure.

5 - QUELLE EST LA CAUSE DE LA DERMATITE ATOPIQUE ?

La cause de la DA n’est pas clairement connue, et elle est probablement multiple. Plusieurs facteurs innés et acquis interagissent pour produire cette maladie, tels qu’un dysfonctionnement de l’immunité et un dysfonctionnement de la barrière cutanée.

6 - LA DERMATITE ATOPIQUE EST-ELLE UNE ALLERGIE ?

La DA est une maladie complexe et un dysfonctionnement allergique est un élément majeur des causes de la DA. L’allergie est une réponse nocive du système immunitaire du corps à des substances normalement inoffensives, comme les pollens, certains aliments, les acariens de la poussière domestique et d’autres allergènes. Chez certains patients qui souffrent de DA, ces allergènes peuvent déclencher des poussées de DA. Cependant, la grande majorité des patients souffrant de DA ne doivent pas suivre un régime alimentaire particulier. Tous les régimes alimentaires, en particulier pour les enfants, doivent faire l’objet d’une discussion avec un médecin, car un régime peut être nocif.

7 - COMMENT EVOLUE LA DERMATITE ATOPIQUE ?

La dermatite atopique est une forme durable d’eczéma, qui commence souvent pendant l’enfance, qui souvent s’améliore lorsque le sujet grandit, mais qui persiste parfois à l’âge adulte. La DA peut aussi dans certains cas ne commencer qu’à l’âge adulte. Les facteurs associés à la forme chronique de DA incluent une DA débutant à un âge précoce et la présence d’une maladie allergique, comme l’asthme et le rhume des foins.

8 - QU’EST-CE QU’UNE POUSSEE ?

Une poussée est une période pendant laquelle les démangeaisons sont intenses et la peau est très inflammée et douloureuse. Certains sujets présentent une alternance de poussées aiguës et de phases plus calmes, avec des démangeaisons légères et une inflammation cutanée mineure. Même entre les poussées, la peau est souvent très réactive aux changements de température, au stress ou aux produits irritants pour la peau. Cependant, lorsque les démangeaisons et l’inflammation cutanées sont constantes, il est difficile d’identifier clairement les poussées.

9 - QUELLES SONT LES CAUSES DES POUSSEES CHEZ LES PATIENTS SOUFFRANT DE DERMATITE ATOPIQUE ?

Les facteurs qui déclenchent les poussées sont différents selon les sujets. Certains facteurs déclencheurs classiques sont les changements de météo, les douches chaudes, les bains moussants, les savons détergents, la chaleur, la laine, les parfums, les produits pour la peau, la transpiration, le stress émotionnel ou la consommation de certains aliments. Les poussées sont plus fréquentes pendant les mois froids et humides. En outre, les infections bactériennes et virales peuvent aggraver la DA.

10 - QUELLES SONT LES CONSEQUENCES D’UNE DERMATITE ATOPIQUE SEVERE ?

Une DA sévère est plus susceptible de provoquer un manque de sommeil et de la fatigue, un stress chronique et même une dépression. La DA peut avoir un impact important sur la qualité de vie des patients, à tous les âges, ainsi que sur celle de leur famille. Il est très important de parler avec votre médecin si vous pensez que votre DA vous rend triste ou qu’elle perturbe votre vie sociale ou personnelle. Si votre enfant souffre d’une DA qui cause des troubles du sommeil, sachez que cela peut provoquer des problèmes d’apprentissage à l’école ou avoir un impact sur vos activités professionnelles.

11 - TROIS CHOSES IMPORTANTES A SAVOIR SUR LE TRAITEMENT DE LA DERMATITE ATOPIQUE

Il est très important de comprendre trois choses pour éviter tout malentendu avec les professionnels de santé :

1. La DA est une maladie chronique, qui dans la plupart des cas dure plusieurs années. Cela ne signifie pas que vous ou votre enfant souffrirez de DA toute votre/sa vie. En effet, la plupart des enfants voient leur état s’améliorer en grandissant. Même lorsque la DA persiste à l’âge adulte, les patients bénéficient souvent de périodes très calmes et très stables.

2. La DA n’est pas due à une allergie à un seul allergène, mais des allergies, par exemple, alimentaires, peuvent coexister avec la DA et parfois déclencher des poussées.

3. Même si la DA ne peut être guérie par un seul traitement court (comme une infection peut être guérie par des antibiotiques), il est possible de la contrôler à long terme pour que les patients puissent mener une vie aussi normale que possible. Un traitement bien mené peut faire une différence importante.

12 - COMMENT TRAITER AU QUOTIDIEN LES PLAQUES ROUGES/L’INFLAMMATION DE LA DERMATITE ATOPIQUE ?

  • Les médicaments les plus fréquemment utilisés contre les plaques rouges sont les dermocorticoïdes. La plupart du temps, on applique les dermocorticoïdes une fois par jour seulement, de préférence le soir.
  • Les dermocorticoïdes peuvent être plus ou moins puissants (effet faible, modéré, fort et très fort) et existent sous différentes formes (crèmes, pommades, lotions, mousses). Votre médecin vous prescrira la puissance et la formulation les plus adaptées, selon votre âge et l’emplacement des plaques.
  • D’autres médicaments souvent utilisés pour traiter les plaques rouges sont les inhibiteurs topiques de la calcineurine (ITC).
  • Seulement deux ITC sont disponibles : le tacrolimus en pommade et le pimécrolimus en crème.
  • Il est important de traiter les plaques rouges avec des dermocorticoïdes ou des ITC, car c’est la meilleure manière de réduire les démangeaisons et le grattage, qui font progresser la maladie.
  • Les antihistaminiques sont rarement efficace contre les démangeaisons de la DA, sauf s’ils ont des propriétés sédatives.
  • Le fait de traiter les plaques rouges aide à renforcer la barrière cutanée.
  • Les dermocorticoïdes et les ITC doivent être appliqués jusqu’à ce que les démangeaisons soient apaisées, jusqu’à ce que les plaques rouges aient disparu ou jusqu’à ce que la peau soit redevenue lisse. Il est très important de ne pas arrêter le traitement trop tôt, pour éviter un rebond rapide. Une approche de diminution progressive de la fréquence peut être la meilleure solution et, pendant la phase d’entretien, on utilise parfois un traitement de prévention des poussées 2 à 3 fois par semaine.
  • Une autre chose importante, à ne pas négliger, est de commencer le traitement par dermocorticoïdes ou ITC dès l’apparition des plaques rouges,c’est-à-dire lorsque la peau rosit et devient légèrement rugueuse. N’attendez pas que la poussée soit sévère pour commencer le traitement. Si vous attendez trop longtemps avant de commencer le traitement, il sera beaucoup plus difficile de traiter la poussée.
  • Le médecin pourra prescrire l’application de bandages humides en plus des applications de dermocorticoïdes (voir le tutoriel sur le wet wrapping) pour renforcer l’efficacité du traitement. 

13 - QUELLES SONT LES RECOMMANDATIONS GENERALES POUR LES SOINS CUTANES DANS LA DERMATITE ATOPIQUE ?

  • Utiliser des produits non parfumés (détergents de synthèse) et non du savon.
  • Éviter les bains chauds prolongés, leur préférer des bains d’eau tiède rapides (5 à 10 minutes) ou des douches.
  • Aucune recommandation claire n’est donnée pour ce qui est de la fréquence des bains ou des douches. Un bain ou une douche tous les deux jours, ou même tous les jours, semble être une bonne fréquence.
  • Utiliser un produit émollient après le bain ou la douche, immédiatement après avoir séché la peau en douceur, par tapotements. La peau peut encore être légèrement humide lors de l’application du produit émollient.
  • L’utilisation régulière d’un produit émollient est la meilleure manière de renforcer la barrière cutanée. Il peut être appliqué le soir ou le matin, en particulier en association avec un traitement anti-inflammatoire par dermocorticoïdes ou ITC (voir ci-dessous).
  • En association avec un traitement anti-inflammatoire, les produits émollients doivent être appliqués après l’anti-inflammatoire.
  • Le produit émollient doit contenir le moins possible d’allergènes. Vous pouvez utiliser une pommade (texture plus grasse) ou une crème (texture plus légère), selon vos préférences ou celles de votre enfant, le degré de sécheresse cutanée et la saison.
  • Parfois, l’application de produits émollients sur une peau très inflammée peut provoquer des sensations de brûlure. Ces sensations ne doivent pas être interprétées comme une allergie aux composants des émollients. Votre médecin pourra vous demander d’arrêter l’application de produits émollients pendant quelques jours pendant les poussées aiguës.

14 - LES DERMOCORTICOÏDES SONT-ILS DANGEREUX ?

Les dermocorticoïdes sont habituellement très efficaces et très sûrs, mais certaines personnes souffrant de DA ont peur de les utiliser. Il ne faut pas confondre les dermocorticoïdes et les stéroïdes pris par voie orale (sous forme de comprimés ou de sirop). Les dermocorticoïdes sont beaucoup plus sûrs que les stéroïdes pris par voie orale car ils sont appliqués directement sur la peau inflammée, sans affecter l’ensemble du corps. Les effets secondaires sont très rares dans le cadre de l’utilisation de dermocorticoïdes dans la DA aiguë, sur prescription médicale. De plus, ils peuvent être utiles pour le traitement d’entretien et la prévention des poussées. Toutefois, si vous êtes un adulte ou un adolescent et que vous souffrez de DA, il y a deux cas particuliers que vous devez connaître pour éviter les effets secondaires :

  • Les dermocorticoïdes forts ne doivent pas être appliqués quotidiennement sur le visage pendant plus d’un mois, car ils peuvent provoquer une fragilité et une rougeur cutanées. Une utilisation intermittente, par exemple l’application des dermocorticoïdes tous les deux jours ou 2 fois par semaine, réduit le risque d’effets secondaires.
  • L’appliacation de dermocorticoïdes à l’intérieur des cuisses et sur les seins (chez les filles et les femmes) pendant des périodes prolongées peut provoquer l’apparition de vergetures, en particulier chez les adolescentes. De la même manière, les femmes enceintes souffrant de DA doivent être prudentes lors de l’application de dermocorticoïdes sur l’abdomen pour éviter les vergetures.

15 - QUE SONT LES INHIBITEURS TOPIQUES DE LA CALCINEURINE (ITC) UTILISES CONTRE LA DERMATITE ATOPIQUE ?

Votre médecin vous a peut-être prescrit du pimécrolimus ou du tacrolimus. Ce sont des traitements topiques sans stéroïdes nommés « inhibiteurs topiques de la calcineurine ». Ils ne sont pas plus efficaces que les dermocorticoïdes mais ils peuvent être utiles si vous souffrez de DA chronique, en particulier sur le visage ou les paupières. Ils peuvent aussi être utiles en d’autres endroits du corps pendant la phase d’entretien, pour prévenir les poussées. Le tacrolimus et le pimécrolimus peuvent être utilisés en toute sécurité chez l’enfant et chez l’adulte. Rien n’indique que les inhibiteurs topiques de la calcineurine pourraient causer des cancers. Ces produits ne provoquent pas l’apparition de vergetures mais ils peuvent causer une sensation de légère brûlure, en particulier au début du traitement.

16 - QUE PEUT-ON DIRE DES INFECTIONS CUTANEES ?

Si vous souffrez de DA, vous avez peut-être eu un ou plusieurs épisodes d’infection cutanée.

  • Chez les patients atteints de DA, la barrière cutanée est fragile ; or certains microbes, comme la bactérie staphylococcus aureus, sont présents en grand nombre à la surface de la peau, même lorsqu’elle n’est pas inflammée. Les infections cutanées dues à S. aureus peuvent se traduire par des croûtes jaunes douloureuses sur la peau et aggraver la DA. Ce type d’infection peut nécessiter un traitement antibiotique, prescrit par un médecin, mais peut souvent être soigné en augmentant l’utilisation de dermocorticoïdes en crème. Des bains d’eau de javel diluée, ou d’autres désinfectants, peuvent aussi être utiles dans ce contexte. Consultez votre médecin pour savoir quelles sont les possibilités.
  • Les patients souffrant de DA peuvent aussi souffrir d’épisodes d’infection cutanée due à un virus, comme un herpès. C’est pourquoi les membres de la famille et les amis ayant un antécédent avéré ou suspecté d’infection par herpèsvirus (p. ex., boutons de fièvre) doivent éviter tout contact avec les personnes souffrant de DA pendant une poussée active d’herpès.

17 - QUAND ET COMMENT TRAITER LA DERMATITE ATOPIQUE PAR VOIE SYSTEMIQUE ?

La plupart des patients souffrant de DA peuvent être traités efficacement en associant des produits émollients et des anti-inflammatoires topiques en crème. Des médicaments systémiques peuvent toutefois être nécessaires pour contrôler une DA sévère. Ces médicaments peuvent être pris par voie orale, sous forme de comprimés, ou par voie sous-cutanée, sous forme d’injections. Les stéroïdes pris par voie orale présentent des risques et apportent peu de bénéfices ; il convient de les éviter au maximum. La cyclosporine A est un médicament immunosuppresseur d’action rapide autorisé dans de nombreux pays européens. Le méthotrexate, l’azathioprine et le mycophénolate sont des médicaments immunosuppresseurs d’action plus lente qui sont parfois utilisés par certains spécialistes bénéficiant d’une solide expérience dans ce domaine. Le dupilumab est un nouveau produit biologique autorisé dans l’UE depuis peu. Il cible exclusivement la partie du système immunitaire qui est hyperactive chez les patients atteints de DA. Le traitement systématique de la DA doit être administré uniquement par des spécialistes bénéficiant d’une solide expérience dans ce domaine.

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